MARC-AURÈLE FORTIN 1888-1970

août 17, 2021 on Nouvelles by steve

« Tous les artistes subissent l´influence des autres pour la technique, le métier. Mais le véritable artiste conserve sa tour d´ivoire, qui est impénétrable. La tour d´ivoire, c´est le domaine de l´inspiration, c´est là que l´artiste va chercher ses idées sur l´art. »

(Marc-Aurèle Fortin, 1969)

S’il existe quelque chose tenant de la royauté dans le monde de l’art au Québec, un peintre se démarque particulièrement du lot parmi les quelques artistes historiquement marquants de notre pays, j’ai nommé Marc-Aurèle Fortin.

En effet, si les Impressionnistes ont marqué l’art de la fin du dix-neuvième siècle en Europe et que les Picasso, Braque et Matisse en ont marqué la première partie du vingtième, le Québec a une dette artistique majeure envers cet artiste hors du commun.  Son influence a touché le travail de la plupart des artistes d’ici et ce, des années 30 à aujourd’hui.

Son approche picturale a laissé une marque indélébile tant pour les peintres non-figuratifs qui ont révolutionné notre art et notre culture au milieu du siècle dernier que chez les peintres figuratifs qui, encore aujourd’hui, tentent de traduire la réalité visuelle du Québec.  Son courage artistique a permis de voir la peinture comme plus qu’un simple moyen de représenter la réalité et la poésie même de son âme a accordé une licence inestimable à tous ceux capable de voir plus loin que leurs yeux.

Né à Sainte-Rose dans la partie nord de l’Île Jésus (maintenant Laval) en 1888, le prolifique Marc-Aurèle Fortin a été peintre, aquarelliste, graveur et dessinateur et ses paysages très décoratifs et colorés mettent en valeur l´aspect pittoresque de la nature.

On reconnaît facilement son œuvre par ses sujets de prédilection : ormes feuillus,  maisons rustiques, charrettes de foin et le port de Montréal.  Peu porté sur la représentation humaine, ses sujets semblent toujours subalternes à la nature.

Dès le début du vingtième siècle, Fortin étudie avec deux des principaux artistes québécois de l’époque, Ludger Larose et Edmond Dyonnet, mais se rend bientôt à l’Institut d’art de Chicago pour parfaire son art.  Dès son retour, en 1912, Fortin s’affaire à développer un style paysagiste qui se démarque déjà de ce qui se fait ailleurs.  À compter de 1918, il s’intéresse à l’aquarelle et, bientôt, les arbres « troués » qui sont, pour plusieurs, emblématiques de son œuvre, apparaissent.  Peu satisfait de sa technique d’aquarelle, il revient vers l’huile et, dès la fin des années 1920, on le retrouve exposant aux États-Unis et en Afrique du Sud.  Quelques années plus tard, il expose en France et en Italie où il parfait son art jusqu’en 1935.

Il revient au pays cette année-là et son œuvre  est totalement transformé.  De peintre un peu sentimental, il devient beaucoup plus cérébral et débute alors l’exploration plastique pure pour laquelle il est maintenant reconnu.

C’est à compter de la moitié des années 1930 qu’il développe ce qu’il appellera « la manière noire » qui consiste  essentiellement à l’application de couleurs pures sur des fonds noirs de façon à  « intensifier la relation entre l’ombre et la lumière », comme il le dit lui-même.  Il utilise aussi des fonds gris « pour décrire l’atmosphère chaude des ciels du Québec ».  Cette approche peu orthodoxe aura une influence dans la façon de travailler de moult artistes qui viendront révolutionner l’art une quinzaine d’années plus tard.

Fortin revient à l’aquarelle vers la fin des années 30 accentuant les tons délavés de ce médium de traits de crayon noir.  Il se met aussi, à la même époque, à l’estampe qui deviendra pour un temps, l’un de ses médiums de prédilection.  Il expose en permanence,  à compter de 1940, à la galerie l’Art Français – aujourd’hui la Galerie Valentin – à Montréal.

Le début des années 50 le voit se tourner vers la caséine – une détrempe à base de lait – avec laquelle il brosse des tableaux d’une puissance et d’une perfection jamais atteinte par l’artiste auparavant.

Le diabète interrompt la carrière de l’artiste à compter de 1955 et un nombre important de tableaux confiés à son gérant seront détruits sans cérémonie.

Quatre ans plus tard, il reprend ses pinceaux mais avec des résultats peu intéressants.  Il griffonnera des paysages au crayon feutres jusqu’en 1966 moment où il perd entièrement la vue.  Un ami, René Buisson, l’installe au sanatorium de Macamic en Abitibi, où il s’éteint le 2 mars 1970, aveugle et amputé des deux jambes.

Aujourd’hui, l’œuvre de Fortin tient une place plus qu’enviable dans l’histoire de l’art de chez-nous et, consécration ultime, depuis mai 2007, on peut admirer une importante collection des œuvres de Marc-Aurèle Fortin au Musée des beaux-arts de Montréal. La Fondation Marc-Aurèle Fortin ayant remis l’ensemble de sa collection, une centaine d’œuvres, à cette institution.

Peintre extrêmement prolifique, il laisse, selon plusieurs historiens, une œuvre comptant près de 10 000 tableaux, estampes et dessins qui se retrouvent dans des collections prestigieuses et importantes, un peu partout dans le monde.

Steve Pearson

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