Dans un récent article, nous vous avons parlé de Narcisse Poirier, l’un des grands peintres figuratifs québécois du vingtième siècle dont l’œuvre a quelque peu souffert des aléas de la mémoire collective.

Dans ce nouvel article sur nos peintres « oubliés », nous aimerions vous parler d’un autre grand peintre figuratif dont l’œuvre s’étend de la dernière partie du dix-neuvième siècle à la Deuxième Guerre Mondiale, John A. Hammond, RCA. (1843-1939)

Né à Montréal dans une famille d’origine britannique, John Hammond, suivant les traces de son père,  devient coupeur de marbre à l’âge de neuf ans.  De nature aventurière, il se joint à la milice locale en prévision d’une attaque des Fenians, nationalistes irlandais qui attaquent les places fortes britanniques de façon à faire pression sur les Anglais qui occupent l’Irlande.

Dès les années 1860, ce même esprit d’aventure l’amène en Nouvelle-Zélande avec son frère comme chercheur d’or!  Il y passera trois années avant de revenir à Montréal en 1870 où, auprès de William Nottman, il devient photographe.  C’est à ce titre qu’il se joint à Commission Géologique du Canada qui s’affaire à tracer la voie que prendra le chemin de faire du Canadien Pacific vers l’Ouest canadien.

Grand admirateur de l’école de Barbizon et des peintres hollandais, Hammond devient membre de l’Académie Royale des Arts du Canada.  Rapidement, il obtient une belle réputation en tant que paysagiste et peintre de scènes marines.

Il peint en France et en Hollande au cours des années 1880 où il côtoie Jean-François Millet.  Il expose au Salon de Paris en 1886 où il remporte deux prix et expose aussi à l’Académie Royale de Londres et au prestigieux  National Academy of Design à New-York.

Il devient ami de l’homme d’affaires et collectionneur William Van Horne qui avait acheté quelques-unes de ses œuvres.  Van Horne est président du Canadien Pacifique et il mandate alors Hammond pour que celui-ci réalise des tableaux et des murales montrant certains des endroits desservis par le CP.

Il voyage aussi en Asie par bateau où il observe l’art japonais et chinois mais ceux-ci n’auront qu’une influence mineure sur l’œuvre du peintre.

En 1893, Hammond est nommé chef du département des beaux-arts de la Mount Allison University à Sackville, au Nouveau-Brunswick, et est administrateur du musée des beaux-arts Owens de l’université.  Il s’installe d’ailleurs dans cette ville et y passera le reste de  sa vie et sa carrière faisant de la région sa principale source d’inspiration

John Hammond est décédé en 1939 à l’âge de 96 ans. Il avait conçu le design du  « Hammond Gate » de l’Université Mount Allison et celui-ci porte son nom. Sa maison à Sackville a été désignée lieu historique national du Canada en 1990.

Des exemples de son travail se retrouvent aujourd’hui dans de nombreuses collections partout au Canada et dans le monde…


John Hammond par/by Edmond Dyonnet

Peu connu au Québec au cours des années suivant sa disparition, on ne retrouvait ses œuvres que chez quelques collectionneurs et musées. 

C’est vers la fin des années 1980 que ses héritiers décident de lui faire retrouver la place qui lui revient dans l’Histoire de l’art au Canada.

À cette fin, ceux-ci contactent Denis Beauchamp qui est déjà bien connu comme agent d’artiste partout au Canada.

Beauchamp, un peu aventurier comme le fût Hammond, décide de relever le défi et prend en main la carrière posthume du vieux maître.

Rapidement, l’œuvre de Hammond revient prendre une place méritée dans plusieurs galeries prestigieuses un peu partout au Canada.  Hammond retrouve alors une place de choix dans le marché de l’art et sa cote monte de façon proportionnelle.   De nombreux collectionneurs découvrent une œuvre riche et accomplie et les nombreux tableaux de la succession du Maître sont prudemment mis en marché au cours de la décennie qui suivra.

Au début des années 2000, Hammond fait partie des valeurs sûres de l’art au Canada et les collectionneurs savent qu’ils font une bonne affaire en acquérant des œuvres du peintre dont la carrière a repris toute la vigueur qu’elle avait connu près d’un siècle avant!

À compter de la fin des années 2000, Hammond, comme bien d’autres peintres, verra son marché ralentir considérablement dans l’ombre de la récession majeure survenue en 2008-2009.  Les galeristes du Canada – et d’ailleurs – ont plus de mal à convaincre un public frileux d’investir dans l’art et les prix des œuvres d’Hammond le rendent parfois moins accessible. 

C’est la situation qui prévaut aujourd’hui et qui explique une certaine stagnation des ventes d’œuvres de Hammond en galerie au moment d’écrire ces lignes.  Ceci étant dit, les ventes dites « secondaires » – de particulier à particulier – peuvent, quant à elles, s’avérer assez intéressantes.

Ajoutez à ceci les fluctuations imprévisibles du marché de l’art et l’achat d’une œuvre à bon prix aujourd’hui pourrait se traduire par un profit d’ici quelques années.

Évidemment, comme nous le savons tous, la meilleure des raisons d’acquérir une œuvre d’art reste en tout temps le plaisir que l’on tire de posséder un petit morceau de beauté et cela devrait suffire à quiconque choisit d’orner ses murs d’un tableau de l’un des Grands Maîtres de l’art canadien.

S.M.Pearson, le Balcon d’Art, Avril 2019